« On dit que la légende de l'Ouest fut écrite sur la selle d'un cheval. Mais aucun cheval ne l'avait contée avec son cœur... Jusqu'à ce jour... »
 
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 [LIBRE] Némésis - ♀ - Nomade

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Atlas

Vache en kilt adoratrice de cornemuse

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MessageSujet: [LIBRE] Némésis - ♀ - Nomade   [LIBRE] Némésis - ♀ - Nomade Icon_minitimeJeu 14 Fév - 22:54


Némésis

« On pleure ainsi parce qu'on a dans la mémoire les larmes universelles que la mort a fait répandre »
Jules Renard

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Personnage


Prénom : Némésis.
Sexe : femelle.
Âge : environ huit ans.
Race : clydesdale.
Robe : bai brun sabino.
Origine : Ecosse.
Groupe : nomades.
Grade : cheval de travail.

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Physique


Némésis, c'est le genre de jument qui attire aussitôt le regard. Sa haute stature y est sans doute pour quelque chose. Son mètre soixante-dix ne fait pourtant pas d'elle une géante parmi ses congénères de race, elle est même plutôt petite. Pour une jument de trait, elle est étonnamment élancée et légère dans ses allures. Mais elle reste tout de même robuste, puissante, avec de longs crins et d'abondants fanons.
Sa robe s'ajoute à son charme. Némésis est bai brun sabino. Sa robe se confond en mille nuances de brun, allant du brun-roux sur les parties inférieures de son corps jusqu'au brun sombre sur les parties supérieures. Ces différentes teintes sont harmonisées par la présence de pommelures, visibles principalement au niveau du flanc. Ses crins sont d'un noir de jais, et ses membres le seraient également si le sabino ne les couvraient pas d'un blanc neigeux, qui s'étend jusqu'à son ventre, et atteint presque les reins au niveau de la hanche. Le gène l'a également dotée d'une large liste, dont les bords sont aussi confus que ses autres taches, et est responsable de ses superbes yeux d'un bleu glacé particulièrement pâles.

.


Caractère


Agréable. Facile à vivre. Docile. Les nomades aiment la qualifier de bien des choses, se plaisent à vanter ses qualités de jument de travail. Némésis est en effet d'une douceur qui fait honneur à sa race. Elle est toujours égale à elle-même, tranquille, affectueuse, volontaire. Elle ne rechigne pas au labeur, et s'efforce de montrer le meilleur d'elle-même sous les harnais comme sous la selle. Appréciée de beaucoup, parfois jugée comme ennuyeuse par les esprits les plus enflammés. Sa bienveillance bien connue fait d'elle une personne à laquelle on fait instinctivement confiance, tout en elle, jusque dans ses gestes, n'est qu'amour et douceur. Elle s'attache facilement, pardonne aussi. Mais comme elle se sent superficielle ! Elle a parfois l'impression qu'elle ne pourra jamais plus ressentir la passion féroce d'une profonde affection. Cette partie d'elle-même est restée auprès de la vie à laquelle elle a été arrachée... Elle observe sa vie passer et l'analyse comme une spectatrice, sans vraiment y prendre part, sans vraiment y jouer son rôle. Elle laisse le monde, la fatalité, qu'importe, elle laisse tout cela tracer son chemin et elle le suit avec docilité. Elle a oublié depuis longtemps ce qu'étaient le désir, les ambitions. Elle ne les redécouvre qu'à travers sa sensibilité hors norme, une sensibilité observatrice à laquelle aucun détail n'échappe. Ce qui peut sembler anodin pour beaucoup devient pour elle un éclat de magie empli de beauté. Némésis ressent plus qu'elle ne voit. Elle a la faculté de juger un inconnu — jugement objectif, dénué de toute mauvaise intention — d'un simple regard, de reconnaître la pureté, la bonté, la cruauté... Et parfois même les plus profonds tourments.

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Histoire


La vie n'est pas tendre avec tous. Némésis, elle, aura eu une existence plutôt paisible... Et pourtant, elle aura connu la douleur de la perte.

La baie est née dans une modeste ferme, destinée à devenir par la suite un prestigieuse élevage. Elle y fut choyée, et pour cause : c'était une petite miraculée. Deux jours plus tôt, un violent incendie avait coûté la vie à deux chevaux, et l'on avait craint que sa mère n'ai avorté des suites du stress. Mais Némésis vint au monde en parfaite santé. Elle se familiarisa vite avec les êtres qui peuplaient son petit monde ; sa mère, une douce jument baie, les humains, un couple de vieux paysans et leur fils qui la traitèrent toujours avec respect et bienveillance, et enfin, les autres chevaux. Ils n'étaient guère nombreux : seulement un jeune entier destiné à devenir étalon dès la prochaine saison de monte, une imposante jument qui avait été acquise récemment, et une autre, plus âgée, que Némésis apprit par la suite être sa grand-mère maternelle... Ainsi que celle de l'orphelin.

Lui, c'était Storm Miracle. Le poulain avait perdu ses deux parents la même nuit, celle de sa naissance : sa mère en lui donnant la vie, affaiblie par l'incendie, et son père, qui était également le géniteur de Némésis, lorsqu'une poutre s'était écrasé sur son box. Mais la fascination de la pouliche envers l'orphelin n'était pas due à leur fraternité.
Souvent, elle l'observait depuis son pré ou son box. Elle n'avait jamais eu l'occasion de jouer avec lui, ni même de l'approcher ; lui restait toujours dans ce petit enclos qu'il refusait de quitter. Storm Miracle aurait pu être beau, très beau même, s'il avait accepté que l'Homme l'approchât. Privé de soins et de nourriture, il était d'une terrible maigreur, et son poil était devenu terne et sale. L'on se demandait comment il pouvait encore avoir la force de se tenir debout. Et pourtant, il était là, ses jeunes muscles s'agitant en frissons entre les os qui saillaient sous sa peau, le pas vif, nerveux. Ce n'était plus un vulgaire poulain ; c'était un étalon sauvage, indomptable, privé de sa liberté, contraint par la force. Ses yeux, des yeux passionnants, hypnotiques, aux iris différents, luisaient d'une fureur incontrôlée née de la terreur. Ses flancs se soulevaient au rythme de son acharnement, son coeur ne faisait plus qu'un avec les vagues s'écrasant sur les rochers, bien loin de là. Tout en lui n'était que révolte, une splendide révolte qui grondait et rugissait. Il était la plus belle chose que Némésis ai jamais vu dans les vastes collines d'Ecosse — une beauté sauvage, vue par les yeux purs de l'enfance.

Mais bien vite, Storm Miracle disparu de la vie de la pouliche. Comme ça, du jour au lendemain. Némésis était trop jeune pour comprendre l'absence ; mais elle lisait dans les regards silencieux que s'échangeaient les adultes l'annonce de sa mort. Et elle enfoui au creux de son coeur le souvenir de ce frère qu'elle n'avait pu connaître, et qu'elle était destinée à ne plus jamais revoir.
Le temps ne s'arrêta pas.

Peu de temps après, elle connu un nouveau bouleversement de son petit monde ; l'arrivée d'un nouveau poulain. C'était le fils de la grande jument, qui était déjà pleine lorsque le couple en avait fait l'acquisition. Il n'était pas aussi splendide que l'orphelin, certes. C'était un jeune animal docile et amical. Mais très vite, Némésis se prit d'affection pour ce camarade de jeu, et les deux poulains devinrent inséparables.
Mais les enfants grandissent, et ils ne firent pas exception à la règle. A l'aube de l'adolescence, ils connurent quelque chose de nouveau qui enflait dans leur ventre. Leur apprentissage de la vie les avait conduit là, devant ces sentiments étranges et l'inconnu. Leur façon de se voir avait changé, et bien vite leur candide camaraderie devint une idylle de jeunesse, brève, passionnée. Une idylle insouciante et sans limites.

Elle allait sur ses six mois lorsqu'il était venu pour la première fois. C'était un homme, un homme comme elle en avait vu tant au cours de cette demi-année, et pourtant bien différent. Il avait cet air hébété, ailleurs, mais pourtant quelque chose dans son regard, dans son expression, le rendait dérangeant. Une sorte de froide cruauté dissimulée, silencieuse, mais bel et bien tapie là et prête à jaillir. Et l'on devinait aisément qu'elle était motivée par la misère et le besoin. Il était venu et avait demandé, avec son attitude qui n'inspirait que méfiance, à acheter Némésis. Elle n'était pas à vendre.
Mais il revint, encore et encore, toujours plus insistant. Puis l'insistance fit place à la menace, au chantage, à tous les moyens les moins conventionnels. Cela dura durant deux ans. Et, pris au piège, sans autre recours, les paysans durent se résoudre à céder leur précieuse pouliche pour une bouchée de pain, et la promesse que le premier-né de celle-ci, si elle devait pouliner un jour, leur appartienne. Promesse que l'étranger ne tint jamais.

Il emmena la jument, et jamais plus elle ne revit sa mère qu'elle avait tant aimé et admiré, son ami qui avait partagé ses jeux et sa passion, les humains qui l'avaient choyé, et tout son petit monde. La rupture fut douloureuse, et cette plaie intérieure demeura à vif quelques temps. Mais, auprès de ce nouveau propriétaire qu'elle apprit se dénommer Jeff, elle ne se départit jamais de sa nature docile. Il ne la montait ni ne l'attelait, malgré qu'elle eusse déjà reçu les bases du débourrage sous la selle comme sous les harnais. Il y avait avec eux un hongre vieillissant, un croisé ne dépassant pas le mètre cinquante-cinq, Ernest. L'âge avait parsemé sa robe alezane de poils blancs et creusé son dos. Pourtant, malgré ses vingt ans passés et son pas nonchalant, il portait encore son cavalier sans jamais se plaindre. Il était pourtant d'humeur régulièrement maussade, toujours tranquille et souvent silencieux, ne parlant que lorsqu'il le jugeait nécessaire comme s'il veillait à ne pas gaspiller le peu d'énergie qui lui demeurait de ces longues années vécues. Son seul regard, le petit frémissement de ses oreilles ou le balancement de sa queue suffisait à ce qu'il se fasse comprendre. Pourtant, Némésis s'attacha vite à ce vieux ronchon, et le soupçonna même d'éprouver une affection toute réciproque.
Sa nouvelle vie était fort étrange et elle mit du temps à s'y habituer. C'était une vie d'errance, sans autres attaches que le vieil Ernest et son cavalier envers lequel Némésis ne pouvait s'empêcher de nourrir sa méfiance. Elle avait appris du hongre alezan, qui le connaissait depuis aussi longtemps que sa mémoire le lui permettait, qu'il n'avait pas toujours été aussi froid et renfermé, parfois même brutal ; c'était la vie qui avait fait de Jeff cet homme menaçant et calculateur. Son esprit était troublé par une impulsivité et une instabilité qui n'étaient que névrotiques, et lui avaient valu tout au long de sa vie d'être rejeté et solitaire. La ruine et la haine avaient fait du jeune homme, qui avait autrefois soustrait Ernest à un propriétaire cruel, un être sournois.

Elle avait tout juste trois ans lorsque son enfance resurgit devant elle. Jeff s'était arrêté aux abords d'une petite ville où il était entré dans ce qui semblait être un bar, ou peut-être bien une auberge, dans le but de se restaurer avant de reprendre la route. Il avait laissé Némésis et son compagnon non loin de celle-ci, attachés à un arbre sous l'ombre duquel ils se reposaient de leur longue marche. Mais quelque chose avait poussé la jument à redresser l'encolure. Un nouvel arrivant venait de stopper sa monture quelques dizaines de mètres plus loin. Cet homme paraissait si différent de Jeff ! Son regard, son attitude n'étaient que douceur et respect. Il se laissa glisser au bas de sa monture et ne prit pas même la peine de l'attacher. A quoi bon, de toute façon ? L'animal semblait si grand et puissant qu'on avait l'impression qu'un simple petit geste de sa part aurait pu briser n'importe quel lien. Il était plus grand encore que Némésis, et pourtant, elle devinait qu'il n'avait guère plus que son âge. Si quelque chose torturait son esprit à la vue de cet entier splendide, elle aurait eu bien du mal à la reconnaître si leurs regards ne s'étaient pas croisés un instant. Ces yeux polychromes, luisants d'honneur et de noblesse, pleins d'un éclat sauvage et féroce... Comment aurait-elle pu les oublier ? Il était là, devant elle. Le fantôme bien vivant de celui qui avait hanté son enfance. A présent, il n'avait plus rien de l'orphelin maigre et farouche, sinon cette présence captivante, irrésistible, sinon ce quelque chose sauvage et indompté qui dansait autour de lui. C'était un entier puissant, taillé de muscles fins et de formes souples, l'intensité de sa robe et le satin de ses longs crins de jais resplendissant dans le petit matin. Tous les regards se tournaient vers lui, mus par cette étrange gravité qu'est l'admiration.
Des voix avaient soudain éclaté à l'intérieur, et la violence apparente des propos avait arraché Némésis à la vision du grand Clydesdale sombre. Ernest, qui somnolait paisiblement l'instant précédent, s'agitait à présent nerveusement. Jeff sortit brusquement et se dirigea à grands pas vers ses chevaux. Sans un mot, il les détacha, réajusta les sacs sur le dos de Némésis, ressangla Ernest et se mis en selle. Il talonna son hongre et le trio s'éloigna en silence, malgré l'air qui crépitait d'une grande nervosité.

Les semaines devinrent des mois et rien d'autre ne vint perturber l'existence de l'homme et de ses deux chevaux. Seulement, Némésis devenait de plus en plus fatiguée, et le rythme lent d'Ernest qui lui avait paru mou auparavant était devenu le sien également. Elle se sentait lourde, maladroite, et ne comprenait pas pourquoi. C'était quelque chose de nouveau et d'étrange qui la perturbait, et elle se demandait si elle n'était pas tombée malade. De plus, il lui paraissait que ses flancs s'élargissaient, et manger moins lors des pauses ne fit qu'accroître sa faim et l'affaiblir plus encore. Ernest s'était aperçu de ce changement, mais n'avait fait aucune remarque, se contentant de veiller un peu plus sur elle. Jeff se rendit lui-aussi vite compte que quelque chose clochait et son comportement changea. Et, à mesure qu'elle avançait dans sa troisième année, il ne faisait plus aucun doute qu'elle était pleine.

C'est à cette époque que Jeff rencontra deux hommes de sa tranche d'âge, et qui inspiraient eux aussi la méfiance de Némésis. Cependant, elle avait su trouver une petite lueur de bonté en lui au fil des mois qu'elle avait passé en sa compagnie et dans les rares fois où Ernest avait évoqué son cavalier. Alors, elle se garda de juger trop vite ces nouveaux humains, les seuls qu'elle avait vu accepter Jeff comme l'un des leurs malgré son esprit torturé. Elle s'intéressa alors à leurs montures, un entier et une jument de noble ascendance, mais aux caractères aussi glacials que le laissait présager le regard hautain et froid qu'ils posaient sur la grande et douce jument et son vieux compagnon au poil blanchi. Devant cette attitude obstinément fermée et leur mutisme dédaigneux, Némésis n'insista pas et se contenta de les gratifier du même genre de réactions ou de les rabrouer froidement lorsqu'ils esquissaient un rictus dégoûté en glissant des regards vers Ernest.

Le petit groupe gagna un port sur la côte. Si Némésis avait déjà vu la mer au cours de ses trajets avec Jeff et Ernest, elle n'avait jamais été confronté à toute l'agitation d'un grand port et à la taille gigantesque des navires si proches. C'était terriblement impressionnant. Mais elle ne broncha pas, fidèle à sa nature tranquille et obéissante, et malgré la nervosité qui la rendait agitée, elle demeura sagement auprès d'Ernest.
Elle se retrouva attachée dans la cale d'un petit navire avec le vieil hongre et leurs deux compagnons. Et le sol se mit à tanguer sous leurs sabots.

Némésis n'avait jamais connu cela. Elle sentit la crainte compresser son cœur et, paniquée par le son des vagues s'écrasant contre la coque et le roulis qui lui faisait perdre l'équilibre, elle se débattit contre la longe qui la retenait. Les chevaux des deux autres humains lui jetèrent des regards moqueurs, puis, après s'être amusés quelques instants de son comportement, s'en lassèrent et l'insultèrent sur un ton exaspéré. Étonnamment, Ernest pris sa défense en répliquant d'une voix si agressive que les deux compères se turent aussitôt, surpris de sa véhémence. Ils ne s'intéressèrent plus à l'improbable duo de tout le voyage.
Némésis, rassurée par la présence et le calme du vieil hongre, se calma au bout de longues minutes d'affolement. Épuisée, elle se rapprocha de lui autant que la longe lui permettait et ferma les yeux. Elle ne tarda pas à se laisser aller à la somnolence, bien qu'elle ne trouvât pas le sommeil le premier jour.

Mais un nouvel événement vint bouleverser la traversée de l'océan. Ils étaient déjà en mer depuis une ou deux semaines — dans ce roulis incessant et la succession à peine détectable des jours et des nuits, on perdait toute notion du temps — lorsqu'une vague de douleur étreignit brusquement le ventre de Némésis. Elle laissa échapper un renâclement surpris qui réveilla Ernest à ses côtés. Si la douleur se dissipa, elle revint presque aussitôt à la charge, plus féroce encore. Némésis, affolée de ne comprendre ce qui lui arrivait, poussa un gémissement et s'agita, donnant des coups de sabots à ras de son ventre. Elle s'agita si bien qu'elle rompit la longe. La souffrance se faisait plus intense, plus précipitée. Elle entendait à peine Ernest qui lui disait quelque chose, qu'elle ne comprit pas. Elle arpentait son petit coin de cale, heureusement assez spacieux, tournant en rond en renâclant bruyamment. Elle fini par s'écrouler au sol, tremblante. Des voix l'entouraient, des bruits de pas s'approchaient rapidement. Mais elle ne sentait plus que la souffrance lancinante dans le bas de son ventre.
Lorsque l'atroce sensation de déchirement se dissipa, Némésis, épuisée, découvrit près d'elle Jeff qui lui parlait comme jamais elle ne l'avait entendu. Bien différent de l'humain renfermé et menaçant, il avait une voix pleine de bonheur et d'émotions, et s'exprimait volubilement, les yeux brillants. Elle ne comprenait pas ce qu'il disait ainsi, mais, pour la première fois, elle sentit croître en elle une sorte d'affection pure et sincère pour cet homme que la vie avait brisé, et comprit qu'il ressentait la même chose envers elle — et plus encore envers Ernest. Elle leva le regard vers l'alezan. Il la contemplait avec un sourire chaleureux, une expression qu'elle ne lui avait encore jamais vu. Puis son regard glissa vers les mains de Jeff. Alors elle le suivit.
Il y avait là un petit être qui la contemplait de ses grands yeux aussi bleus que l'océan sur lequel ils se tenaient.
Pandémonium.

L'hiver avait chassé les beaux jours. Le froid était glacial, mordant. Il s'infiltrait entre les poils de la jeune jument et la faisait frisonner. A ses côtés, le jeune poulain qui allait sur ses cinq mois trébuchait dans la poudreuse, tremblant jusqu'aux os. La couverture de fourrure que Jeff avait ôté de son dos pour en couvrir le petit animal l'avait pourtant quelques peu réchauffé. L'humain marchait près du poulain attaché à sa mère, tenant maladroitement les longes de la grande jument et du vieil Ernest. La santé du hongre s'était dégradée au cours des derniers mois. La venue de l'hiver avait été dure pour l'alezan dont la vie avait déjà été bien longue. Il semblait plus faible que jamais, et pourtant, il continuait de donner tout ce qu'il pouvait donner à son cavalier. Les trois équidés et l'humain faisaient un bien piètre tableau. Cela n'avait pas échappé à leurs compagnons, les deux chevaux marquant fièrement la trace en relevant l'encolure avec dédain, et leurs cavaliers se lassant d'avoir à attendre leur camarade et son vieux cheval qui n'était, selon leurs dires, plus bon qu'à abattre. Mais ils ne pouvaient comprendre l'amour indéfectible qui unissait les quatre retardataires. Ils ne voyaient que la valeur factice des choses, celle de l'argent.

Némésis enjoignait son fils à presser le pas de frôlements de naseaux, parce qu'elle savait qu'au-delà du rideau brumeux, ils trouveraient la chaleur d'un feu. Ils avaient tous besoin de se réchauffer, elle un peu moins que les autres sans doute. Sans la fourrure dont il avait couvert Pandémonium, Jeff tremblait de plus en plus, au point de s'appuyer contre Ernest pour partager ensemble un peu de chaleur. Oh ! Comme il aimait ce poulain ! Depuis le premier instant, quelque chose s'était tissé entre l'humain et le poulain au regard d'océan. C'était quelque chose d'inexplicable, de la même façon que l'amour avait gonflé le coeur de Némésis à la vue de son fils. Certes, cela ne pouvait égaler la puissance du lien qui unissait Jeff et Ernest, qui avaient, en quelques sortes, grandis ensemble. Leurs vies entières étaient entremêlées, inextricablement, magnifiquement. Ils se comprenaient et s'aimaient mieux que quiconque, comme des frères, comme une seule âme. Mais à présent, Pandémonium s’immisçait dans leur amour, non pas comme une cassure, mais comme un petit éclat d'infini.
Les deux autres chevaux avaient disparus dans la brume. Leurs cavaliers se préoccupaient du froid plus que de leur camarade. Némésis aurait voulu offrir son dos chaud et vigoureux à Jeff, mais elle savait que l'inactivité lui donnerait plus froid encore et que ses deux autres compagnons ne pourraient aller à une allure plus rapide que celle-ci. Alors elle ne pouvait rien faire d'autre que les encourager, et sentir son coeur frémir de leurs tremblements. Et, soudain, Ernest trébucha. Il tomba dans la neige, sans un cri, sans un mot. Il n'y eut que le choc sourd de son corps dans la poudreuse. Et ce fut tout.
Le vieil hongre alezan était mort.

Jusqu'au bout, il avait offert ses dernières forces à son cavalier. Il l'avait soutenu en silence, comme depuis toutes ces années, il lui avait prêté son flanc chaud pour avancer encore un peu. A présent, son frère devrait avancer seul.
Némésis se souvient seulement que son cœur avait arrêté de battre. Il y eut un cri qui rompit le silence, un hurlement plein d'une douleur incommensurable, celle d'un homme brisé auquel on vient d'arracher une partie de l'âme, de l'être tout entier. Jeff c'était écroulé contre le corps de son vieil ami, et nul n'aurait pu dire s'il était dominé par la peine ou la rage. Sa souffrance était comme un poignard, féroce, intolérable. A-t-elle parlé ? Elle ne sait plus. En cet instant, il n'y avait plus que la terreur face à la perte si brutale du vieil hongre qu'elle n'aurait pu aimer plus. La douleur. Puis une présence, toute proche, bien réelle et profondément obscure. Quelque chose l'avait tiré loin de là. Elle s'était débattue, enfin, peut-être, mais ça l'avait entraîné loin de Jeff, loin de Pandémonium, loin d'Ernest... Loin de sa vie.

Némésis s'est retrouvée parmi les nomades. Elle ne sut jamais qui l'avait vendue à ces Hommes — ses compagnons de voyage avaient-ils trahi Jeff, ou bien les nomades l'avaient-ils capturé auprès de lui ? —, mais elle n'a jamais tenté de s'enfuir. Pour aller où ? Elle ne savait pas où était Jeff, s'il vivait encore. Ni Pandémonium. Oh, son fils, comme la plaie était lourde à son cœur ! Le reverrait-elle jamais ? Elle est restée égale à elle-même. C'était ainsi qu'Ernest l'aimait.

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Informations



○ Personnages liés :
Atlas (demi-frère paternel/cousin maternel - celui qu'elle connait sous le nom de Storm Miracle a toujours été pour elle une sorte d'esprit sauvage, presque fantastique, qu'elle n'a fait qu'observer de loin sans jamais avoir de contact avec lui) ;

Pandémonium (fils - son fils, son ange, sa chair, son petit poulain aux yeux d'océan dont la séparation, cinq mois seulement après sa naissance, a laissé dans le cœur de Némésis un vide douloureux qu'elle ne peut combler qu'avec des doutes ; est-il seulement encore vivant ?)

○ Soumis à rp-test : oui

○ Autre :

.


Kit


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Némésis

Proposé en libre-adoption

.


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