« On dit que la légende de l'Ouest fut écrite sur la selle d'un cheval. Mais aucun cheval ne l'avait contée avec son cœur... Jusqu'à ce jour... »
 
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 « When my heart beats sometimes I feel it burning. »

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Anoki

Leprechaun à taches

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Anoki

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MessageSujet: « When my heart beats sometimes I feel it burning. »   « When my heart beats sometimes I feel it burning. » Icon_minitimeMar 23 Avr - 19:41



Sometimes I feel it burning
FT. ROSES

I twisted my guts and bled my tears in the same place where empty dreams blinded me like glare on the guillotine. Now, I know that my holy land fills with my screaming demons. But that's where you are.


Le soleil s'embrasait à l'horizon. Sa lumière d'or et de sang étirait de longues ombres rougeoyantes sur l'herbe courte qui poussait entre les tipis. Elle faisait courir quelques chaudes lueurs sur la robe d'ébène d'Anoki, caressait ses parures. Il allait d'un pas tranquille, un peu trop tranquille peut-être. Il gardait la tête haute pour qu'on ne voit pas son abattement, mais elle lui semblait plus lourde que jamais. Quelque chose s'était brisé en lui, quelque chose s'était éteint. Une petite flamme qui ne brillerait plus jamais. Il sentit à peine Bidziil glisser contre son flanc, adresser quelques paroles aux autre cavaliers à leurs côtés, et saisir les rênes de corde pour le guider jusqu'au centre du camp. Comme toujours au retour d'une chasse fructueuse, bien des membres de la tribu s'étaient attroupés pour voir les prises, les femmes pour préparer la viande. Mais l'habituelle joie qui caractérisait l'événement demeurait absente. La tribu était tendue, la tribu était inquiète, et ne festoierait pas ce soir. La tribu pleurerait, comme chaque jour depuis bien trop longtemps maintenant, ses pertes.
Bidziil ôta le maigre harnachement de sa monture — des cordes en guise de rênes et un léger tapis sur son dos — et lui intima l'autorisation de s'éloigner d'un regard. La douleur dans les yeux du chef vieillissant meurtrit un peu plus le cœur d'Anoki. Il pouvait la cacher à sa tribu, pas à son vieux compagnon.

Anoki s'éloigna d'un pas traînant, errant sans réel but entre les tipis. Il se dirigea finalement vers les abords du camp, qui semblaient si tranquilles, comme impassibles à la violence poignante qui dévorait la tribu. Oh, comme tous souffraient, ici. Il avait abandonné sa vie d'avant, ses amis, sa famille, il avait tout laissé derrière lui et fui ses responsabilités pour apaiser son être tourmenté auprès des lakotas, si joyeux, si fiers, si déterminés. Il avait changé, à leur contact. Il avait appris à accepter la douleur des autres, alors qu'il ne parvenait pas même à apaiser la sienne. Il avait appris à les aider pour leur bonheur plus que pour le sien. Mais, à présent, tout semblait voler en éclat, et ce petit paradis sombrait dans les ténèbres. Ce que la vie lui avait si patiemment enseigné paraissait bien inutile à présent que sa propre souffrance surpassait et noyait celle des autres.

« Anoki ? »

L'étalon redressa la tête, tourna son regard smaragdin vers la jument qui approchait. Sa voix était si douce, si pleine de gentillesse, et pourtant si triste. Mais elle pansait son coeur comme une brise doucereuse, chassait le trouble de son esprit avec une telle habileté qu'il ne pouvait qu'en être surpris. Et émerveillé. Il sourit tendrement à la belle jument qui approchait, son flanc gonflé se balançant à chaque pas. Dans son étrange regard, qui ne manquait jamais d'intriguer Anoki, il pouvait lire une once d'inquiétude. Pour lui ? Il en ressentit un petit pincement au coeur. Il ne voulait inquiéter personne, surtout pas la belle Roses, qui avait bien d'autres soucis.

« Je... Est-ce que tout va bien ? Oh, désolée, je suis bête de te demander ça... » murmura-t-elle en contemplant le sol d'un air gêné.

Anoki se rapprocha d'elle d'un pas vif et glissa son chanfrein sous son bout du nez pour le relever. Il se recula d'un pas pour la contempler avec douceur, plongeant son regard dans le sien.

« Ce n'est rien. Tu veux bien rester avec moi ? Un peu de compagnie me ferait plaisir. » lui répondit-il dans un sourire.

Elle lui répondit d'un sourire timide. Il ne pouvait s'empêcher de la trouver si pure, si innocente. Si adorable quand elle avait cet air candide. Il savait qu'elle n'était pas toujours à l'aise dans la tribu, et faisait de son mieux pour la soutenir et être présent. Elle avait tendance à rester distante avec les hommes, et à se méfier plus encore des mâles. Il ne pouvait que se sentir plus flatté encore qu'elle semble lui accorder sa confiance, et qu'elle ai accepté auprès d'elle Bidziil et Winona. Parfois, il se disait même qu'elle appréciait la jeune femme, qui était celle qui s'occupait le plus d'elle. Elle l'avait longuement pansée, choyée, mais n'avait jamais tenté de la parer de peintures ou même de plumes. Elle ne la sentait sans doute pas prête. Souhaitait-elle choisir la belle jument pie comme monture ? Elle n'avait en effet jamais désigné de cheval et montait la plupart du temps l'étalon de son père ou certains chevaux sans cavalier attribué. Anoki espérait qu'une complicité se tisserait entre les deux. Il aurait été ravi de voir la jument trouver enfin sa place.

« Viens, allons un peu plus loin. » lui glissa-t-il avec douceur en désignant d'un petit mouvement de tête les quelques arbres qui ombrageaient un coin paisible suffisamment éloigné du camp.

Une étrange expression passa dans le regard de la jument, qui pencha légèrement la tête de côté avec un air timide et hésitant en le dévisageant. Un bref instant plus tard, elle répondait d'un léger sourire tout en arborant un air gêné, presque rougissante. Anoki la contempla avec curiosité, étonné de sa réaction. Pourtant, il était heureux de ne pas savoir les secrets de son esprit en cet instant, lui qui avait si souvent été la proie des émotions des autres. Il avait enfin l'impression d'être à sa place, d'être lui, d'être normal. Secouant la tête pour repousser les mèches de son toupet qui avaient glissé sur ses yeux, il attendit que la belle vienne à ses côtés pour la guider vers leur destination.

Ils marchèrent un instant en silence, et Anoki glissa un regard vers l'ancienne solitaire. Elle semblait perdue dans ses pensées, un peu absente. Il ne pu s'empêcher de laisser ses yeux caresser ses jolies formes, qui, malgré son ventre fort arrondi, restaient délicates et féminines. Elle était vraiment belle. Elle ressemblait à un petit ange égaré, et cette pensée lui donnait une envie terrible et implacable de la protéger. C'était étrange. Avec elle, il se sentait heureux, il se sentait apaisé. Il voulait rester auprès d'elle pour toujours, écarter tous les dangers de son chemin, sécher chacune de ses larmes et transformer chaque nuage en sourire. Elle était si belle lorsqu'elle souriait. Un frisson parcouru son échine. Mais à quoi il pensait, au juste ? C'était une amie, une amie qui avait besoin de soutient et de tendresse. Pas qu'on la dévisage en s'extasiant sur le fait qu'elle soit terriblement attirante.

« Comment te sens-tu aujourd'hui ? » s'enquit-il pour chasser son trouble.

Elle eut un petit sursaut et leva le regard vers lui, comme revenant à la réalité. Elle cilla et glissa un regard vers son flanc.

« J'ai l'impression d'être toujours si lourde et si fatiguée que si je m'allongeais, je serais incapable de me relever. » murmura-t-elle.

Anoki la regarda avec tendresse. Dans un geste presque instinctif, il vint coller son flanc au sien et effleura sa joue de son bout du nez.

« Eh bien, moi, je te relèverais. »

Roses s'empourpra brusquement, et il la sentit se crisper contre lui. Se souvenant qu'elle était toujours mal à l'aise avec les mâles, il s'empressa de s'écarter avec un air désolé. Il avait rapidement compris l'origine de son mal-être, et la raison pour laquelle elle n'avait jamais parlé d'un quelconque compagnon. Mais il n'avait pas voulu la brusquer, et n'avait à aucun moment évoqué le sujet avec elle, la laissant libre de lui en parler si elle le souhaitait. Savoir qu'un monstre avait pu lui faire une chose aussi horrible le mettait hors de lui. Et voir la belle jument, pourtant si triste, culpabiliser envers elle-même alors même qu'elle ne semblait pas avoir de rancune envers quiconque d'autre lui brisait le cœur. Ayant mis entre eux une légère distance, il osa un petit coup d'oeil vers elle. Il se surprit à apercevoir dans ses yeux quelque chose qui ressemblait fort à de la déception. Peut-être que sa présence le rassurait, au fond ? Mais pourquoi alors s'était-elle crispée ainsi ? Est-ce que... Est-ce qu'elle avait des sentiments pour lui ?

Ils continuèrent de marcher dans un silence un peu gêné. Anoki ne savait plus comment se comporter. Il jetait parfois des regards à la jument, hésitant à se rapprocher d'elle, à lui demander s'il se faisait seulement des idées. Mais c'était si étrange comme question qu'il n'osait pas lui poser. Ils parvinrent au petit coin ombragé, et alors qu'ils s'arrêtaient, il fallait bien rompre le silence.

« Il va bientôt naître, n'est-ce pas ? » souffla-t-il, quelques peu hésitant.

Il était conscient que sa question était plutôt déplacée, et qu'il était clair qu'il parlait plus pour rompre cette ambiance étrange qui pesait sur eux plutôt que pour s'informer. Il avait côtoyé assez de juments pleines pour savoir que Roses arrivait à terme. Elle eu un air troublé, un peu perdu, comme si elle avait peur de l'échéance.

« Je suis sûr que tu feras une formidable mère, la rassura-t-il avec un sourire. Je resterais avec toi aussi longtemps qu'il le faudra, je veillerais sur lui comme sur mon propre fils, je te le promets. »

Elle baissa les yeux, laissant un sourire amer flotter sur ses lèvres. Il aurait même pu jurer voir quelques larmes briller dans son regard lorsqu'elle le releva vers lui.

« J'aurais aimé que tu le sois. »


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