« Under the northern lights »

Ses membres s'enfonçaient dans la poudreuse, ses balzanes disparaissaient dans la froide matière qui en rendait blafard l'éclat. Dahlia levait haut ses petits sabots, avançant avec la méfiance d'une biche effarouchée. Fréquemment, son regard quittait le sol enneigé pour s'accrocher à la vision rassurante de celui qui ouvrait la marche. Serbk ne semblait pas ressentir le froid qui la mordait. Étais-ce parce que sa robe argentée s'accordait bien mieux avec le paysage gelé que son poil roux ? Oh, c'était une supposition complètement absurde, et la petite Dahlia le savait. Mais elle ne pouvait s'empêcher de songer qu'elle était hors de son élément, pas à sa place, et que lui s'accordait si bien avec la beauté de la saison des neiges. Et, dans quelques années, lorsque sa robe aurait quitté ses pommelures et qu'il arborerait son gris d'adulte, sa robe immaculée aux reflets d'argents si prisée parmi ceux de leur race, il serait véritablement un prince nivéen, à n'en pas douter. Ah, qu'elle était fière de partager les sangs de Serbk, la petite Dahlia ! C'était bien incongru de penser qu'elle, pouliche chétive et si banale, puisse être la jumelle d'un tel prodige.
Un rire s'éleva dans la distance, et Serbk s'arrêta si abruptement qu'elle manqua de se cogner à lui. Elle releva la tête vivement et le contempla avec perplexité. Il tourna vers elle ses si beaux yeux d'azur, qui pétillaient d'une sorte de malice joueur.

« On dirait qu'on va avoir un peu de charmante compagnie ! » glissa-t-il dans un murmure.

Dahlia lui répondit d'un sourire timide et s'avança à ses côtés, s'appuyant contre son flanc chaud à l'odeur si parfaite. Au fond d'elle, elle sentait poindre une petite douleur dans son cœur, là où se glissait l'idée qu'une pouliche approchait et qu'elle ne serait plus seule avec son frère. Mais elle n'avait pas le droit d'être si égoïste, de vouloir garder ces instants juste pour eux, d'empêcher son cher frère d'être adulé par ces demoiselles simplement parce qu'elle avait encore peur qu'un inconnu de la juge, elle, l'anormale, la sœur ratée. Et puis, Serbk ne l'abandonnerait jamais, n'est-ce pas ?