« There's nothing painfullest than this heart's shape »

Messages : 3 Points d'XP : 5 Date d'inscription : 08/09/2020

Painful heart's shape

DAHLIA

Petite Dahlia avait les membres tout douloureux de ses errances. Pas après pas, elle avait avancé dans la brume de ses doutes, elle avait posé ses yeux sur des dizaines, des centaines peut-être, d'autres équidés. Mais aucun n'était l'inconnu qu'elle cherchait. Aucun n'était celui qui était si cher au cœur de Luna. Elle se sentait impuissante, face à l'immensité dans laquelle il pouvait se trouver, face à ce désespoir qui la gagnait peu à peu. Elle était si petite, si fragile. Comment pouvait-elle espérer que son chemin la porte là où elle pourrait remplir le vide de la blanche jument ? Luna lui manquait. Elle avait perdu le compte des fois où le soleil s'était levé. Une interminable procession de lumière, un entrelacs de jours et de nuits qui lui accrochaient à l'estomac ce petit sentiment tenace qu'elle n'y parviendrait jamais. Son ange immaculé lui avait dit qu'elle l'attendrait toujours s'il le fallait, mais Dahlia craignait qu'elle ne l'ai déjà oubliée. Oh, elle ne voulait pas remettre en doute la parole de Luna, mais comment une si belle créature pouvait-elle garder si longtemps en mémoire la futile petite chose qu'elle était ? Elle prit une inspiration. Encore un pas. Elle se rendit soudainement compte qu'elle se trouvait près de là où elles s'étaient quittées. Ses naseaux s'emplissaient des parfums du troupeau auquel elle appartenait. Ils se souvenaient encore de cette fragrance qu'elle portait. Mais comment pourrait-elle oser se présenter devant Luna alors qu'elle avait failli à sa quête ? Elle n'avait pas le droit de la retrouver, pas tant qu'elle n'aurait pas tenu la promesse qu'elle lui avait faite. Et elle s'accrochait désespérément à l'espoir de revoir un jour la si douce jument, un espoir vain qui donnait la force à ses membres d'affronter la distance. Toujours plus loin.

Deux silhouettes surgirent brusquement non loin, et passèrent dans un fou galop sans même la remarquer. Ils laissaient derrière eux les senteurs du troupeau, mêlées aux effluves de la peur et du sang, et Dahlia sut que quelque chose allait de travers. L'angoisse la gagna lorsqu'elle songea qu'il s'agissait du troupeau de Luna. Des terres où elle vivait. Et s'il arrivait quelque chose à la blanche ? Dans un élan de courage dont elle s'ignorait capable, la petite alezane s'élança dans la direction d'où venaient les deux chevaux. Elle s'attendait à tout instant à découvrir une robe immaculée, peut-être tachée de sang. Mais lorsqu'elle s'arrêta à l'ombre d'un petit bosquet, la vision qui griffa ses yeux était toute autre.
Il y avait là un cheval au sol, au corps déchiré de plaies. Mais Dahlia s'en aperçut à peine ; à son chevet, un immense étalon pommelé se dressait. Elle ne l'avait jamais vu, elle ne connaissait pas même son nom. Mais elle savait. Ce jour serait celui où elle retrouverait enfin son ange blanc.

(c) PF

Messages : 3 Points d'XP : 5 Date d'inscription : 08/09/2020

Painful heart's shape

DAHLIA

Elle galopait aussi vite que ses membres le lui permettaient. Elle ignorait si elle allait dans la bonne direction, mais son instinct l'appelait là-bas. Son être entier l'avait appelé vers Luna depuis l'instant où elle avait posé les yeux sur elle pour la toute première fois. Alors, elle lui faisait confiance. Elle aurait pu galoper les yeux fermés, certaine d'aller là où il le fallait.

« Dahlia ? »

L'alezane se tourna si brusquement qu'elle manqua de chuter. Elle était là. Avec sa robe immaculée, avec ses yeux merveilleux, avec sa voix si douce. Elle semblait un peu essoufflée, comme si elle venait elle-aussi de galoper à toute allure. Et elle semblait étonnée, confuse de trouver là la petite alezane dont les crins commençaient à coller à l'encolure sous l'effet de la transpiration. Mais Dahlia sentit sa fatigue s'envoler sitôt posa-t-elle les yeux sur son ange de lumière. Elle l'avait retrouvée. Elle se souvenait d'elle ! Elle ne pu retenir les larmes qui picotèrent ses yeux, le tremblement dans ses membres. Elle était si profondément heureuse.
Mais Luna ne semblait pas l'être. Elle avait cet air égaré, proche de l'affolement. Alors l'alezane se souvint de la raison de sa présence. Elle se souvint de la silhouette massive du bai sombre. Et du corps dans l'herbe. Du corps auquel elle avait à peine prêté attention, du corps de ce qui devait être l'un des camarades de la blanche. La honte la submergea. Comment pouvait-elle être heureuse, comment pouvait-elle se sentir ainsi, alors que là-bas, il y avait quelqu'un qui se mourrait ? Quelqu'un qui gisait et qui saignait pendant qu'elle souriait.

« Je l'ai retrouvé, Luna. »

La jument blanche la dévisagea, l'air perdu. Dahlia pencha la tête dans la direction d'où elle venait. Luna avait certainement rencontré les deux chevaux qu'elle avait aperçu. Sans doute savait-elle déjà que le bai était présent. Pourtant, son visage changea. Quelque chose éclaira ses traits, illumina son regard. Et l'alezane n'eut pas besoin du moindre mot pour comprendre la gratitude, le merci muet qu'elle lui adressait avant de se lancer au galop.
Jamais gratitude n'avait tant réchauffé son cœur.

(c) PF

Messages : 3 Points d'XP : 5 Date d'inscription : 08/09/2020

Painful heart's shape

DAHLIA

Dahlia se lança à la suite de la jument immaculée. Elle ne savait plus quoi penser. Les sentiments se bousculaient en elle. Evidemment, elle avait cette douleur lointaine au fond du cœur, cette peine et cette horreur que l'on ressentait face à la mort d'un inconnu. Mais pourquoi elle, petite et insignifiante Dahlia, dont la vie était toute entière tournée vers ces inconnus, ne pleurait-elle pas plus amèrement le camarade de Luna qui se mourrait ? Il était probablement cher à la jument blanche, sans doute bien plus que la petite alezane errante qu'elle était. Elle aurait dû être profondément bouleversée devant cette scène, elle aurait dû soutenir Luna dans sa douleur, la porter si elle flanchait, comme elle l'avait toujours fait avec les autres. Alors pourquoi ne pouvait-elle s'empêcher de ressentir ce bonheur coupable qui chassait le deuil qu'elle se devait de vivre ?

Elle s'arrêta de nouveau sous le petit bosquet. Luna, qui l'avait largement devancée, se trouvait déjà près des deux autres. Elle préférait ne pas les importuner, sa présence serait sans doute malvenue. Elle observa le clydesdale sombre tourner la tête qui semblait dire quelque chose qu'elle ne pouvait entendre. Il était allongé contre le corps, qui semblait à présent inanimé. Dahlia baissa la tête, comprenant que la vie l'avait quitté. De loin, avec cette petite culpabilité du devoir, elle lui rendit un silencieux hommage.
Luna avait un air étrange, qu'elle ne lui connaissait pas. Elle s'aperçu alors qu'elle ne la connaissait même pas vraiment elle-même. Après tout, elles s'étaient seulement rencontrées une journée. Elle se sentit brusquement stupide.

Il lui avait suffit de croiser le regard de la belle jument, de se laisser bercer par quelques gentilles paroles, et elle s'était sentie devenir invincible. Elle avait eu l'impression de compter enfin pour quelqu'un. Elle était si faible, si niaise... Evidemment, qu'elle n'était rien pour l'Ange. Juste une connaissance, rencontrée un soir, juste une jument quelconque assez idiote pour aller courir à travers le monde entier pour retrouver un inconnu. Oh, sans doute Luna avait-elle réellement été bienveillante à son égard. Mais, comme toujours, Dahlia avait été bien trop sensible à sa gentillesse. Elle l'avait laissé empoisonner sa vie, prendre une place bien trop grande alors qu'elles n'étaient que des inconnues. Elle ne connaissait rien d'elle. Stupide petite Dahlia.

Elle releva la tête, les larmes emplissant ses yeux. Là-bas, il y avait un corps qui ne souffrait plus. Et près de lui, son Ange tant admiré, son Ange blanc, qui se tenait tout contre le grand mâle qu'elle avait si longtemps cherché. Ils se soutenaient dans leur douleur, ils affrontaient ensemble la perte de leur ami. Et la petite Dahlia, elle, n'était rien. Bien sûr. C'était ainsi que cela devait être. Elle n'avait jamais été que rien, une âme insignifiante à la croisée de deux chemins. Elle l'oublierait, elle poursuivrait sa route avec celui qu'elle aimait. Et petite Dahlia resterait seule, en arrière. A souffrir l'absence.
Elle cilla pour éclaircir sa vue. Ses lèvres tremblaient de peine lorsqu'elle fit demi-tour pour disparaître, loin de ces vies auxquelles elle n'appartenait pas.

(c) PF

Rechercher

Résultats par : Messages Sujets
Recherche avancée