"La fierté est l'affaire des innocents" - Hurricane et Tialmah

- Vous ne pourriez pas bouger du passage bon sang ?!

L'alezan ouvrit lentement les yeux, trop certain que le cri de mécontentement sonnait réel. Non sans grâce il dévia le regards, cherchant la cause à son propre problème, son œil ambré parcourut l'immense stabule qui l'abritait, avant de s’apercevoir que son interlocuteur était définitivement plus proche que ce qu'il pensait. Il souffla, sans haine, sans méchanceté, juste fatigué, puis scruta le bai qui planté là, semblait prit entre deux eaux.

C'était donc qui lui, la cause de son problème. Rien de très grave certes, même plutôt futile, mais le vacarme tapageur du plus jeune l'avait - à plusieurs reprises - extirpé de son habituel sommeil récupérateur, de quoi le rendre un poil grognon.

Il l'examina alors, comme pour établir le portrait robot du fautif ; il n'était guère très grands, son visage enfantin cerné par des traits aussi téméraires que fougueux, ses yeux d'un jaune vif qui lui rappelait sans nul doute une connaissance du coin tandis que sa robe abordait des reflets roux ternis par l'éternel poussières du fort.

Il hésita quelques peu avant de donner réponse, son éternelle sympathie était un peu lointaine à l'instant présent, mais il ne voulait pas non plus paraître impolie - état presque réciproque par ailleurs -.

Il releva doucement l'encolure tout en chassant les quelques mèches rebelles qui s’aventuraient sur son chanfrein. Il remarqua alors la silhouette grassouillette de Colt au loin qui se détachait avec rondeur de la symétrie parfaite des lieux : il eut un léger rictus tout en pensant qu'on pouvait surement dire la même chose de lui.

Puis seulement, d'un ton posé - presque ensommeillé - il se décida à répondre, du mieux qu'il en était capable :

"Je crois bien que je dormais."

Le plus petit le regardait, tant avec amusement que dédains, exprimant même un léger ronflement - ce qu'Hurri aurait pu aussi faire, mais pas de la même sorte-. Puis il reprit d'un ton égal à lui-même :

- Non, sérieux, vraiment ? Et qu'est-ce qui vous empêche de dormir autre part ?

Hurricane lui décocha un regards relativement vif pour son état, le scrutant avec ennuie ; c'est pour ça qu'il n'appréciait pas spécialement les poulains, ou même les personnes enfantines en général. Enfin c'est ce qu'il se raconte pour essayer de se convaincre de la chose : au final il finit toujours par s'attacher à ce genre de personnage haut en couleur et imperceptible... Au fond, il devait bien admettre que ce genre d'équidés égayaient ses mornes journées, le sortant un peu de sa routine Dodo - Foin - Colt, bien qu'il n'est rien à reprocher à celle-ci.

Il regarda le bai s'agiter de nouveau, sans grand intérêt cependant. Ah, les poulains... . Il prit le temps de réfléchir à sa réponse : il ne voulait pas vraiment répondre à la provocation de l'autre ; ce genre d'agression n'était pas son terrain de jeu, s'il voulait continuer, il continuerait seul. Il souffla, prit de court par l'aptitude de l'autre, puis remarqua seulement que celui-ci déchainait sa haine sur le pauvre licol qui d'un cuir épais et solide entravait sa petite tête : l'alezan en fut légèrement amusé, puis revint sur sa réponse :

"Pas grand chose j'imagine, m'enfin pourquoi voudrais-je changer de place ?"

- Vous êtes sourd en plus d'être borgne ? Vous êtes EN PLEIN dans le passage. Ça ne vous embête pas d'être aussi utile qu'une pelle trouée ?

Hurricane le regarda, surpris, légèrement scandalisé par la réponse abrupte du bai. Décidément, les yeux jaunes vifs amenaient finesse et tact. Puis il détailla l'expression naissante de l'autre : son air avait évolué comme s'il devenait irrité ; l'arnaqueur arnaquer. Le cuivré prit une inspiration importante, puis se relâcha un peu : mal grès tout, lui aussi commençait à s'impatienter fasse au caractère pour le moins courroucé et irrespectueux du plus jeune. Puis doucement, après avoir marqué une pause, il reprit à son tour, sur un ton doux, sans aucune agressivité :

"Écoute, tu devrais juger de ton utilité avant de commenter la mienne."

Puis il bailla, signe de détente tout en chassant la poussière et vent avec ses crins ; l'agitation le fatiguait définitivement.

- Mon utilité ? Je ne suis qu'un poulain enfin, bon qu'à traiter les étalons de pelles trouées et subir les manipulations des hommes en attendant le jour béni où on me foutra une selle sur le dos.

La tirade fut précédé d'un rire franc, trop honnête pour être uniquement joyeux. Le cuivré releva aussi l’attitude emplit de dédain du plus jeune, pas vraiment surpris plutôt agacé. Le poulain esquivait ses questions et répondait à ce qu'il l'arrangeait ; dans le genre bornée il venait de trouvé un concurrent tenace à tout être obstinée.

Il ravala sa salive tout en surprenant le regards bien bas du plus petit. Un énième souffle naquit au creux de son palais, secouant légèrement ses épaules. Puis il préféra relevé un mot que l'autre venait de prononcer, il passerait surement pour un attardé, au moins cette fois il l'aurait fait exprès :

"Subir ?"

- On subit les hommes.

Le poulain accompagna sa phrase d'un subit haussement d'antérieur, comme pour lui donner plus de sens, pour appuyer son propos. L'alezan leva alors la tête, le plus petit quittant définitivement son champs de vision : il scruta les horizons : là entre le bois vieillis des stabules et la poussière omniprésente des lieux se trouvaient plusieurs hommes, où du moins leurs ombres découper par un soleil aride. Il était un peu surpris par la teneur des choses, sa question avait-elle une réelle réponse objective ?

Malheureusement, pas vraiment ; chacun forge son expérience avec ses rencontres, ses nouvelles connaissances bonnes ou mauvaise. Lui-même avait passé la majeur partie de sa vie à subir l'espèce humaine, loin d'ici mais dans un cadre tout égal. Il les avaient détesté de tout son être, hais presque. Jamais il ne pourrait pardonné à ceux qui avait abattue sa douce génitrice. Il s'était battue contre ces hommes, puis avait perdue, comme le soulignait comme son œil.

Mais à côté de tout cela il y avait Colt ; ça sonnait comme une évidence ; cet homme doux l'avait changé. Ils avaient échangés tant de choses ensemble, et le mot subir résonnait terriblement faux à son oreille pour décrire leurs relation. Il y avait eut des bas et des hauts, évidemment, mais jamais rien de violent, de brute...

Clairement, la réponse était grise - Ni noire, ni blanche - mais comment le faire comprendre à son interlocuteur ? Au même âge que le bai il aurait était en accord avec ces propos. La moindre personne qui lui aurait soumis l'inverse n'aurait été qu'un incapable soumis bêtement et docilement aux bipèdes. Il souffla, joua avec ses oreilles puis reporta son attention sur le poulain :

"On subit les Humains, pas tout les hommes"

- Quel différence fais-tu entre Humains et hommes ?

Forcément, la réponse en demi-teinte attisa la curiosité du foncée. Hurri' se redressa un peu, cherchant le meilleur moyen de s'expliquer. Il avait pensée à la simplicité, répondre basiquement sans se creuser la tête du genre qu'il verrait par lui-même un jour où l'autre, mais il y avait toujours l'hypothèse de l’événement qui ne se produirait jamais.

Avec attention il observa le jeune ; outre son caractère assez piquant - de ce qu'il avait perçu - il semblait assez intelligent. Et s'il ne comprenait pas son prochain discours ce n'était pas d'une grande importance ; au moins il aurait essayer. Il hésita presque puis après un léger blanc s'expliqua plus franchement:

"Les Humains ont une certaine nature qui les pousses à être ce qu'ils sont, disons simplement que quelques hommes arrivent à s'en débarrasser, eux sont différents."

Acheva t-il tout en glissant une pensée vers son très chère rondouillard.

- Donc... Pour vous... Les humains sont foncièrement mauvais ? Ça parait assez pessimiste comme vision. Pourquoi n'auraient-ils pas tous leur part de noir et de blanc, comme nous, qui évolue tout au long de nos rencontres ?

L'alezan échangea un court regard avec le plus jeune, il n'avait pas tout à fait tort, ni vraiment raison de son point de vue. Il était aussi légèrement amusé de la réponse du plus jeune qui semblait si contraire à son avis sur la question, à ce qu'il exprimait depuis le début de la rencontre. Puis il reprit alors, exprimant plus précisément son ressentit sur la question :

"C'est assez pessimiste, mais c'est aussi l'endroit qui le veut. Les humains d'ici se battent pour la paix avec comme seule arme la guerre. Ils ne suivent pas leurs instincts mais des ordres, ça à tendance à les abrutir, ils deviennent plus mauvais."

Il effectua une courte pause, pour remettre ses idées en place, puis reprit plus doucement :

"Tu as surement raison pour le reste, je suis bien loin de tout savoir, après tout chaque homme est différent, mais les soldats une certaine tendance à vouloir tout uniformisé."

Sans même s'en apercevoir, il appuya ses propos en avançant légère son épaule, où le sigle "US" était gravé pour le restant de ses jours.