Toujours plus loin, toujours plus haut, toujours plus fort ! Ft moi-même

   Stardust mâchouillait paisiblement du foin, en observant les écuries avec attention. Il balayait du regard les chevaux qui rentraient de patrouille, un peu intrigué par l'excitation palpable des soldats. Quelques uns le regardaient en riant, et il se contentait de secouer la tête, blasé. Un attroupement s'était formé devant la porte, époussetant leur costume bleu avec rigueur. Le caporal ne semblait pas partager la joie, et caressait négligemment la crinière de Colère du Ciel, un peu en retrait. Le gris s'apercevait qu'il se détachait de plus en plus de lui pour aller voir un lâche. Du moment qu'il le sorte, ce n'était pas grave.

  Il s'approcha un peu plus du bord de la stabule, se frayant un chemin entre ses congénères. Il s'appuya contre la barrière, les oreilles en avant, pendant que la porte du fort s'ouvrait. Un jeune soldat s'élança dehors, en lâchant un cri peu viril. D'autres lâchaient des exclamations fort heureuses, tandis que le cavalier du pommelé se décomposait. Il était un peu étonné, se demandant ce qui se tramait derrière la grande porte en bois. Peut-être se trouvait-il un cheval rarissime. Cela ne pouvait être que ça.

    L'attroupement se regroupait autour de l'être qui causait une extrême joie, si bien qu'il ne put voir de quoi il s'agisse. Ce n'était pas un cheval, puisqu'il n'en voyait ni la crinière, ni le garrot, ni la queue. Il huma profondément l'air, et se stoppa en plein mouvement, l'air complètement stupide, les naseaux exagérément ouverts. Cette odeur. Il la connaissait. C'était celle de son ancien cavalier. Non, ce n'était pas possible. Il rêvait. Que viendrait faire Martin ici ? Il était parti, des larmes plein les yeux, en lui disant adieu.

     Et si. C'était bien lui. L'homme croisa son regard, et son visage s'illumina. Stardust ronfla de bonheur, la gorge trop nouée pour pouvoir hennir ou faire quoi que ce soit d'autre. Son cœur tambourinait dans sa poitrine, presque à lui en faire mal, tandis que ses iris turquoises redécouvrirent celui qui lui avait appris sa vie de cheval de fort. Son teint plus mât qu'auparavant, ses cheveux châtains lui tombant sur ses yeux rieurs, sa fine silhouette. C'était comme un rêve éveillé. Il le vit s'approcher, et quand il prit son visage dans ses mains, et que leurs fronts se rencontrèrent, le gris se noyait dans le bonheur.

  Qu'on lui apprenne que la fin du monde était le lendemain, qu'il mourrait dans d'affreuses circonstances, qu'importe, tant que cet homme soit à ses côtés. Sa voix joyeuse résonna dans le silence respectueux, tandis qu'il lui gratouillait les oreilles affectueusement :
"Mon père, t'es la monture du colonel maintenant ! Et figure toi que c'est moi le colonel !"

    Il éclata de rire, et fit rapidement le tour pour trouver l'entrée de la stabule, tandis que son destrier le suivait, le dévorant littéralement des yeux. Il lui mit rapidement un licol, ce qui n'était qu'une formalité, puisque le pommelé aurait pu le suivre jusqu'à l'autre bout du monde en liberté, et le sortit. Quelques bleus rejoignirent l'heureux duo, tandis que Martin lui expliquait qu'il avait été muté dans un autre fort, et qu'il avait épaté la galerie, de ses propres mots, ce qui amena de nombreux éclats de rire dans le groupe d'amis. Il avait fait des combats, et suite à la mort du colonel, il avait été ramené ici car il connaissait les environs. Stardust n'en avait que faire, il était simplement heureux d'être la monture de cet homme talentueux, et malgré ça, ravi d'avoir dépassé le rôle de Khyda et Colère du Ciel !