"Quand surgit une main, à l'odeur carottée" - Hurricane & Asrae

Asrae se sentait incroyablement gonflée. Son ventre était devenu si énorme qu'elle se demandait parfois s'il n'allait pas éclater un de ces jours. Et elle ignorait tant de ces choses là que peut-être, à la limite, cela arriverait vraiment.
D'autres questions, du genre triviales, tournaient sans arrêt dans son crâne, tel une cacophonie qu'elle n'arrivait pas à ignorer. Des trivalités, du genre... quand est-ce qu'elle allait accoucher ? Elle craignait sa douleur. Elle craignait pour la vie du petit être qui grandissait en elle. Et elle s'interrogeait sur lui. Serait-il un mâle ? Une femelle ? Serait-elle... Seraient-ils à la hauteur pour l'élever ? Surtout au milieu de ce Fort ? Oh, elle ne voulait pas élever un délicat et frêle poulain dans cet environnement. Elle frémissait à l'idée qu'il devrait subir le même traitement que tous les sauvages qui se faisait briser par les soldats.
Elle voulait, elle devait fuir, pour le mettre hors de portée des soldats.

Mais comment ? Elle avait essayé, de toutes ses forces, depuis des mois qu'elle était arrivée ici. Et, les choses avaient changées. Peu à peu, elle s'était fiée en son étrange cavalier, si adroit et si distant à la fois, et puis, il y avait eu Wolf. Si bien que la vie au Fort s'était révélée... de plus en plus vivable. Sans compter les diverses rencontres qu'elle avait faites.

Brusquement, elle sursauta, sortie de ses rêveries. Une main amicale s'était posée sur son épaule. Elle s'ébroua, puis cligna des yeux, avant d'enfin reconnaître le soldat. Colt. C'était un gentil soldat grassouillet, cavalier et propriétaire de Hurricane, qui, semblable à quelques autres gentils humains, lui glissait une carotte ou la sortait brouter un peu d'herbe vraiment fraîche depuis que sa grossesse avait semblé évidente, attentions tellement gentilles, et bien appréciées. Ce n'était pas le cas de Jack, mais celui-ci se contentait de la maintenir bien brossée, comme auparavant, bien qu'il ait un autre cheval en charge durant le temps de grossesse d'Asrae (et pour celle-ci, connaissant l'humain, cela semblait déjà incroyable qu'il n'ait pas oublié son existence, alors elle se disait heureuse de ses rapides brossages).

Ce jour-ci, les mains de Colt caressèrent doucement son ventre gonflé, murmurant quelques paroles douces, puis il enfila un licol à la jument rouge, avant de la sortir du paddock et de la conduire près de son étalon cuivré. Il se mit en selle, l'aubère saluant l'alezan, puis ils partirent, Asrae tenue en longe par le cavalier, suivant Hurricane.

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L'étalon cuivré prit alors la parole:

"Alors, comment ça va aujourd'hui ?"

Indécise, Asrae marqua un court silence avant de répondre. Elle n'était pas dans un mauvais jour, où, pour une raison inconnue d'elle, la mauvaise humeur dominait tout, et elle se retrouvait à crier sur tout et n'importe quoi, ou dans un jour où au contraire rien ne pouvait la sortir de sa somnolence; alors, sans doute qu'elle pouvait dire...

"Bien... Je crois."

Elle souffla doucement. Et demanda:

"Et toi ?"

Puis son regard se porta sur l'horizon, et elle l'interrogea encore une fois:

"Est-ce que tu sais... où nous allons ?"

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